Nous avons créé l’association de protection du Gardon et de ses affluents en 2019. A cette époque nous avons compris qu’un arrêté préfectoral du 27 décembre 2018 ordonnait l’arasement du seuil de Collias à la cote de fondation (24,80m) sur un linéaire de 25m environ entre la brèche rive droite et la brèche centrale. EPTB Gardon en avait la maîtrise d’ouvrage. Une étude de la «mise en transparence piscicole et sédimentaire du seuil de Collias sur le Gardon» avait été faite par la société Aquascop, financée par l’agence de l’eau et EPTB. Nous rapportons les résultats de l’étude :
Cette brèche abaisserait le niveau de l’eau de 90 cm à l’étiage, donc en été, viderait le plan d’eau entre les Tinières et l’oseraie et entraînerait une baisse du niveau de l’eau sur 1 km au moins et 2,5 km au plus en amont du seuil. Ce plan d’eau deviendrait un chenal. P53 à P55 d’Aquascop.
- le Gardon aurait une profondeur de 20 cm en amont de la brèche à l’étiage, ce qui entraînerait une accessibilité de la rive droite par l’homme et une fuite de la faune sauvage, des poubelles, des feux…. P60 à P69 d’Aquascop.
- Les castors vivent en amont du seuil sur la rive droite. 12 des 13 terriers référencés seraient exondés, c’est-à-dire inhabitables car leurs entrées seraient au-dessus du niveau de l’eau. Un seul serait encore sous l’eau. P24 d’Aquascop.
Cette baisse du niveau de l’eau entraînerait également inexorablement :
- une baisse du niveau des sources et des nappes phréatiques avec un assèchement du captage de l’eau du village dans la grotte de Pâques. C’est pourquoi le préfet exigeait un nouveau captage plus profond avant l’arasement du seuil.
- une érosion régressive avec fragilisation des berges serait inévitable, favorisée par les crues.
- une réduction du volume de zones-refuges pour les poissons en étiage sévère.
- une accélération des ondes de crue. En effet un seuil casse le courant avec sa chute verticale et oxygène également l’eau.
- un suralluvionnement en aval. On va en effet libérer relativement brutalement plusieurs décennies, voire siècles, d’apports solides. On peut imaginer un remplissage en aval avec une rivière qui coule sous le remplissage. Va-t-on continuer à pouvoir se baigner à Collias ?
- une perte irrémédiable de la possibilité de faire de l’électricité hydro-électrique.
- une perte du patrimoine historique et du patrimoine paysager irrémédiable.
Ce dont rêve une partie de l’administration, ce sont des cours d’eau égouts qui cachent et entrainent la pollution en aval. Cachez cette pollution que je ne saurais voir. Faire couler l’eau est visuellement plus facile que de combattre cette même pollution. C’est ce qui a été fait sur l’Alzon lors de son recalibrage ou chenalisation dans les années 1970. L’Alzon était une belle rivière qui cascadait agréablement et qui est maintenant un canal dans lequel on n’a pas envie de mettre un pied.
En 2020 grâce à l’effort de tous il est enfin décidé de renoncer à l’arasement du seuil, de le restaurer, et même d’ériger une microcentrale hydroélectrique. Nous attendons avec impatience ces réalisations.
Le deuxième combat a débuté en 2020. La préfecture du Gard a lancé une enquête publique sur l’expropriation et la démolition des deux moulins situés sur la rivière l’Alzon. Avec la destruction du moulin « Rémézy » était également détruit le seuil sur l’Alzon avec une vidange de cette rivière déjà en mauvais état. Le motif invoqué par l’administration pour justifier ces démolitions est: « la sécurité des personnes ». Là encore l’association s’est mobilisée en expliquant, en faisant une pétition et beaucoup de publicité. Heureusement, au vu de la vindicte populaire, le projet de détruire les moulins et le seuil de l’Alzon a été abandonné.
Notons que les gorges du Gardon sont une réserve naturelle, classée Natura 2000, un site classé et inscrit, avec un arrêté préfectoral de protection de biotope, c’est-à-dire qu’on protège toute la nature, sauf peut-être l’eau.
Notons enfin qu’en 1865 on notait 52000 moulins en activité en France, chacun équipé d’un seuil. Les espèces de poissons migrateurs protégées au titre de la continuité écologique étaient alors communes dans nos rivières. Comment faisaient-ils pour remonter nos rivières alors qu’ils avaient beaucoup plus de seuils à franchir qu’actuellement ?